Dans son intervention, M. Abdullah Rabhi a déclaré que le monde arabe ne dispose que de 2 % des précipitations mondiales, considérant que la Tunisie est un pays pauvre en eau et que le citoyen n’a pas encore saisi la gravité de la pénurie d’eau dans laquelle vit le pays et agit comme si nous sommes l’un des pays riches en eau.
Dans le même contexte, il a affirmé que notre pays connaît une mauvaise gouvernance dans le domaine de l’eau, expliquant que le principe de base de la gouvernance est le comportement rationnel dans la gestion des ressources faibles et elle n’est pas toujours liée au manque d’eau. Il a souligné, par ailleurs, qu’il y a dix ans, les régions de Tunisie disposaient de moins de 250 m3 malgré leur relative densité de population à l’époque, soulignant la nécessité de revoir la rationalisation de la consommation d’eau des citoyens, tout en affirmant que l’agriculteur donne, à titre d’exemple, plus d’eau à la plante que ce dont elle a besoin.
Dans ce même contexte, M. Rabhi a insisté sur la nécessité d’orienter les pratiques culturales vers des cultures les plus rentables et moins consommatrices en eau, tout en soulignant l’absence de lois à cet égard, d’autant plus que le Code de l’eau de 1975, toujours en vigueur, est devenu désuet et n’est plus valable par les temps qui courent.
M. Rabhi a réitéré à maintes reprises que la situation hydrique dans le pays est très difficile voire même critique, soulignant la diminution notable des précipitations au cours des huit dernières années (à l’exception de la période 2018-2019), et plus particulièrement au cours des cinq dernières années. Il a indiqué qu’une vingtaine de barrages sont aujourd’hui hors service à cause d’un manque de recharge par la pluie et aussi par la surexploitation due à l’irrigation, appelant par la même occasion, à la nécessité de diversifier les sources d’eau en tirant profit des puits inexploités et en offrant des possibilités d’acheminement de l’eau vers les zones sèches.
Il a indiqué qu’en Tunisie, moins de 10 % de l’eau traitée est utilisée à des fins agricoles, et il a parlé de la nécessité de dessaler l’eau de mer, indiquant qu’il existe cinq usines de dessalement d’eau de mer dont certaines sont en cours d’achèvement, en plus d’autres usines dédiées au dessalement de l’eau salée, notamment celles utilisées pour les puits. M. Rabhi a appelé à la nécessité d’intensifier les efforts pour exploiter la station de Zarat, et a souligné l’importance du stockage de l’eau dans le profil du sol et qui est extrêmement important pour l’agriculture, en particulier dans les endroits qui dépendent des précipitations pour la culture des plantes, d’autant plus que la Tunisie dispose de barrages souterrains, différents des barrages de surface et consistent à retenir des eaux souterraines par un parafouille (corps du barrage) mis en place en travers des chenaux des eaux souterrains.
Il a également évoqué l’étude prospective pour la conception et la mise en œuvre d’une stratégie de long terme de gestion intégrée des ressources en eau et pour tenter de désamorcer les différents risques inhérents au développement d’une ressource rare, comme l’eau en Tunisie Selon lui, la sortie de la crise de l’eau dans laquelle nous sommes, nécessitera un certain temps. Parmi les objectifs de cette étude, M. Rabhi a cité l’urgence de trouver des solutions appropriées pour assurer une gestion intégrée des ressources en eau et faire face à la pénurie d’eau à laquelle la Tunisie sera confrontée à l’avenir, en plus d’élaborer un plan stratégique cohérent et intégré et un programme d’action pour une gestion rationnelle et durable des ressources en eau afin d’en assurer une utilisation optimale et de soutenir les fondements d’une gestion intégrée de ces mêmes ressources.
A la fin de son intervention, M. Rabhi a signalé que 3 scénarios sont proposés pour faire face à la pénurie d’eau :
– Scénario 1 : Si la même politique actuelle est poursuivie, une pénurie d’eau de 2 milliards de m3 sera enregistrée, alors que si les réformes nécessaires seront réalisées, la réserve d’eau sera suffisante.
– Scénario 2 : La nécessité de mener à bien les projets et de les parachever, de préserver toutes les ressources en eau disponibles et d’effectuer les réparations nécessaires et immédiates de tout dommage qui pourrait survenir sur les ouvrages et les installations hydriques, avec la recommandation de mener une étude de stratégie sur l’eau sur le long terme pour 2050 et de faire le suivi nécessaire de façon permanente.
– Scénario 3 : Réformer le code de l’eau, revoir la législation et développer un travail de sensibilisation profonde des citoyens sur la question.
Dans son intervention, M. Miquel a donné un large aperçu du projet en cours de réalisation sur la réutilisation des eaux usées consiste en l’utilisation d’eaux usées plus ou moins traitées dans un objectif de valorisation (usage bénéfique).
La REUT permet, en particulier, de diminuer la pression sur les ressources en eau et de libérer des quantités non négligeables d’eaux conventionnelles pour d’autres usages ou pour la préservation de l’environnement et le maintien des ressources en eau de surface et souterraines.
La REUT permettrait de fournir de l’eau d’irrigation aux périodes de fort besoin des cultures, qui couvrent essentiellement le printemps et l’été et de développer d’autres activités agricoles à potentiel économique.
Pour M. Miquel, ce projet est porteur de développement économique et social, dans le sens où il a plusieurs types d’impacts positifs tels que :
• L’augmentation des revenus des agriculteurs suite à l’amélioration de la productivité,
• La création d’emploi, l’irrigation exigeant une intensification en intrants et main d’œuvre,
• La diminution des risques dus aux aléas climatiques et surtout à la fluctuation de la pluviométrie.
Parmi les résultats attendus :
1 – Les résultats concrets et mesurables à court terme :
L’étude de préfaisabilité s’attachera à prévoir une liste d’indicateurs simples, à la fois quantitatifs et qualitatifs, adossés aux domaines techniques, économiques, environnementaux et sociétaux.
2 – L’impact sur les bénéficiaires à moyens terme et moyens de mesure envisagé :
Le suivi de l’adhésion au projet sera aussi qualifié et quantifié, au cours des différentes étapes de l’étude de préfaisabilité : informations préalables, concertations, rendu de l’étude.
Il est certain que ce projet qui s’inscrit dans l’économie des ressources et le Développement Durable La réutilisation des eaux usées épurées présente un intérêt environnemental réel qui s’intègre pleinement dans une logique de Développement Durable.
Cette ressource dite « non conventionnelle » peut se substituer aux prélèvements actuels d’eau brute, et ainsi augmenter le potentiel de production d’eau potable, mais aussi procurer une ressource nouvelle pour divers usages – agricoles, industriels, urbains, recharge de nappe, stockage inter saisonnier.
Les projets de réutilisation des eaux usées traitées participent à la gestion intégrée des ressources en eau et à la préservation de l’environnement. Ils sont particulièrement stratégiques dans les pays arides et semi-arides de la région méditerranéenne, comme la Tunisie, où la pression sur les ressources en eau est forte. De plus, la concurrence entre les différents usages de l’eau devrait s’intensifier dans un contexte de Changement Climatique et de recherche de mesures d’adaptation locales efficaces.
Mme Grojean a relaté, documents à l’appui, tout le cheminement de l’expérience éducative qui a permis à des jeunes des cités de Marseille en France (notamment les quartiers nord) et de Carthage en Tunisie de partir à la découverte de l’eau puis d’échanger leurs observations de part et d’autre de la Méditerranée. L’eau est partout autour de nous, avait-elle précisé, mais si banale et si nécessaire qu’on n’y prête guère attention, sauf quand son prix augmente ou lorsqu’elle risque de manquer.
Pendant quatre ans, plus de 1500 jeunes d’âges et de niveaux scolaires divers sont devenus des reporters de l’eau. Ils ont exploré leur rivière et ses berges, fait connaissance avec le bord de mer et ses activités. Ils ont suivi le cheminement de l’eau dans la ville et pris conscience du long travail nécessaire pour la rendre potable. Ils ont découvert des fontaines et toute une architecture liée à l’eau. Ils ont questionné les habitants de leur quartier et interviewé des experts. Ils ont touché, senti, écouté l’eau, ils ont appris à l’aimer. Ils ont aussi agi pour elle. Puis ils ont communiqué leurs découvertes à travers des productions aujourd’hui réunies dans une mallette pédagogique et réutilisables ailleurs par d’autres jeunes.
Au cœur de ce programme, l’eau apparaît comme un thème privilégié qui permet une pédagogie vitale et ouvre à un modèle éducatif en prise avec les réalités d’aujourd’hui et les questions qui se posent aux générations futures. Mme Grojean a proposé aux acteurs de l’enseignement à Gabès de reprendre ce projet avec des jeunes de Gabès et des régions avoisinantes et de l’améliorer tout en l’adaptant à la réalité du sud tunisien qui souffre de plus en plus de la pénurie d’eau.
Pour Jean-Pierre Dal Pont, les traitements de l’eau font appel aux technologies les plus variées, qui ont considérablement évolué au cours des dernières décennies, particulièrement en ce qui concerne le dessalement de l’eau de mer et des eaux saumâtres (techniques biologiques, membranaires, distillation…). Les technologies se sont également développées pour traiter l’eau dans l’industrie, les différents usages de l’eau nécessitant des eaux de qualités différentes (pharmacie, agroalimentaire, électronique, systèmes de chauffage ou de refroidissement…) ou encore pour traiter les effluents chargés provenant de l’habitat, de l’élevage, de l’industrie et des villes avant leur rejet dans le milieu naturel, voire avant leur réutilisation. Le domaine de l’eau est un domaine extrêmement vaste en évolution constante. Il met en jeu un nombre important de technologies de très haut niveau. Il constitue un domaine industriel avec des usines et des réseaux associés qui peuvent être considérables en termes d’investissement et en frais d’exploitation. L’industrie de l’eau est impactée par les évolutions écologiques, énergétiques et digitales. Cette dernière évolution est en train de transformer en profondeur les métiers et les techniques mises en œuvre et peut permettre de faire face à certains challenges à relever.
Au niveau de l’eau, les humains d’aujourd’hui et de demain doivent faire face à des défis colossaux :
– le premier étant de pallier les manques d’assainissement et d’accès à l’eau potable ;
– ils doivent également pérenniser l’accès à une eau en quantité et de qualité, en trouvant notamment des solutions pour lutter contre les micropolluants (résidus médicamenteux, plastiques, pesticides et les métabolites de ces molécules…) ;
– ils doivent faire face aux sécheresses et imaginer des modes de fonctionnement moins gourmands en eau, que ce soit pour l’agriculture ou l’industrie ;
– ils doivent créer des territoires résilients aux évènements extrêmes pour surmonter des épisodes d’inondations ou encore de canicules, qui se multiplieront avec le changement climatique ;
– ils doivent préserver les écosystèmes et la biodiversité.
Les technologies, le recours au numérique, peuvent et doivent permettre de travailler sur ces défis, mais leur coût financier ou la demande énergétique qu’ils représentent actuellement n’est parfois pas compatible avec les moyens disponibles. L’évolution à venir passe par la nécessaire prise de conscience par les politiques mais également par le grand public de la rareté et de la richesse de cette ressource, à protéger d’urgence pour les générations à venir.
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